Les instances CE et CHSCT ont été convoquées le 30 août dernier afin d'être informées et consultées sur le projet de mise en place de Changepoint. Cet ERP (Enterprise Ressource Planning) se veut être l'élément central de la future chaîne digitale de l'Entreprise. Rappelons qu'un ERP se définit comme un groupe de modules relié à une base de données unique. L’ERP est un progiciel qui permet de gérer l’ensemble des processus opérationnels d’une entreprise en intégrant plusieurs fonctions de gestion (commandes, stocks, paie , comptabilité, RH, production, etc..) dans un système. Autrement dit, l’ERP représente la « colonne vertébrale » d’une entreprise.

Ce projet de refonte des outils a été présenté pour la première fois aux élus le 7 novembre 2017 puis a fait l'objet d'un suivi le 25 avril dernier lors d'une réunion auprès des instances qui a fait l'objet d'un premier article de notre part. Cette lecture préalable vous permet ainsi de vous remettre à niveau à propos des enjeux et objectifs puis des choix qui ont alors été réalisés.

Précisons tout d'abord que l'intitulé de cette information-consultation est un raccourci trompeur car le projet s'accompagne d'autres changements : disparition d'outils, remplacement de l'outil dédié à la comptabilité, revisite des tâches et processus, création d'interfaces , etc... La réunion du jour n'a malheureusement pas apporté tous les éclairages sur ces aspects en raison d'une part de la présence de Laura M. , consultante externe, Directrice de programme, en charge du seul projet Changepoint et d'autre part par l'absence regrettable d'Hughes B.,  Directeur Administratif et Financier et responsable du projet digitalisation. Les conditions n'étaient donc pas réunies pour obtenir toutes les réponses aux interrogations soulevées.

Gérald F., Directeur Général France, a introduit la séance en revenant sur le contexte et les enjeux. L'objectif premier de ce projet est de fournir une réponse à l'obsolescence de nombre de nos outils qui sont à présent trop limités pour nos ambitions, d'éviter aussi les saisies multiples sources d'erreurs et de récriminations envers les personnes responsables. L'étude de cette transformation recouvre à la fois les aspects back office (comptabilité, gestion) et front office (saisie des temps, des frais). L'enjeu est la simplification des traitements,  l'unicité des informations mais aussi de fournir plus de valeur ajoutée aux tâches du personnel utilisant ces outils (diminuer la saisie, accroître le contrôle et la validation). L'objectif complémentaire est la remise à plat des processus en collaboration avec les acteurs du quotidien. Des ateliers (dénommés happy) ont donc eu lieu tout au long du T4 2017 pour recenser les besoins et optimiser les processus. Au bout de cette démarche, des outils ont été sélectionnés et un choix a été fait, en l'occurrence Changepoint. Le travail actuel consiste à formaliser les processus à instancier dans cet outil pour être capable de déployer opérationnellement celui-ci au 1er janvier 2019. Cette date  est souhaitée car correspondant à la clôture comptable annuelle et permettant donc d'éviter de gérer la subsistance de données dans les anciens et nouveaux outils puis de gérer au mieux le report de l'un à l'autre. Si la date du 1er janvier ne peut être tenue, la préférence ira à une modification du périmètre opérationnel (en abaissant le nombre de fonctionnalités) plutôt qu'à un décalage du déploiement. Des alternatives ont été identifiés sur les sujets critiques pour permettre de maintenir l'objectif du 1er janvier pour le déploiement. Le DG France compte participer régulièrement au Comité de pilotage Changepoint afin d'évaluer de façon continue la criticité de la tenue des engagements calendaires. Ce Comité malgré son nom regroupe aussi les projets de portail et d'interfaçage. L'ensemble des processus ne sont pour l'heure pas tous écrits mais il est convenu qu'ils donneront lieu à une application homogène sur l'ensemble de l'Entreprise en lieu et place des traitements disparates pouvant être observés à l'heure actuelle

Plus qu'un projet, une révolution ?

 

Nous serons particulièrement vigilants sur ce sujet d'uniformisation des processus qui doivent enfin mettre un terme à l'inégalité de traitement des salariés notamment sur les frais professionnels. A la question des élus de savoir quelle était la dérive sur le planning prévisionnel, le DG France n'a pas su répondre... Voilà bien un bien mauvais exemple donné par un dirigeant d'une Entreprise dont la rentabilité dépend pour partie de la tenue des engagements des projets contractés avec ses clients ! De même cette présentation n'intègre pas la présentation des risques identifiés, des impacts et des mesures correctives envisagées. Bref, tout ce qui relève d'une bonne gestion de projet a été proprement éludé !

La présentation du projet proprement dit est ensuite faite par la Directrice de programme. Ce projet est constitué de trois phases principales : la redéfinition des rôles et responsabilités, la formalisation des processus cibles, et le choix et déploiement des nouveaux outils. Les raisons de la mise en place d'un nouvel ERP sont les suivantes : l'obsolescence des systèmes actuels, l'insatisfaction des utilisateurs, l'intégration de nouvelles technologies, la suppression du papier et des mails, une meilleure maîtrise des coûts et des risques financiers, la réponse aux ambitions de croissance annoncées, la montée en compétence des intervenants. Les principaux ressentis actuels des acteurs résident dans les saisies multiples, les difficultés de connexion pour les collaborateurs à l'outil Timenet. Les bénéfices principaux de ce projet sont de disposer d'un outil commun, de s'appuyer sur des données uniques, de fournir de l'information instantanément, de faciliter et d'uniformiser la gestion, de fiabiliser et sécuriser les données. Le choix final de Changepoint s'est entre autre réalisé sur deux critères importants par rapport à son concurrent : la possibilité de demander des évolutions de fonctionnalité à son éditeur et la possibilité de disposer d'un support en français. 

Des ateliers fonctionnels se déroulent depuis mai jusque octobre 2018 sur les sujets suivants : organisation/départements , ressources et RH, sous-traitance, engagements (ER, AT, unité d'oeuvre), projets, temps, frais, achats, facturation, reconnaissance du revenu, partage de marge.

Des cartographie actuelle et cible des outils sont présentées. Les principaux changements sont les suivants :

  • Les outils suivants sont supprimés au profit de Changepoint :

- InputER (saisie des temps pour les projets en engagements de résultats (ER)) utilisé par 900 salariés,

- TimeNet (saisie des temps pour les projets en assistance technique (AT)) utilisé par 2300 salariés,

- SYGES (gestion de la production et de la facturation) utilisé par 180 personnes (principalement ADV et assistantes),

- GLPI SVP (échange documentaire entre les assistantes, la paie et les ADV),

- SIER (suivi des projets en ER) utilisé par 120 personnes (principalement RTA et RCP),

Pour l'ensemble du personnel et notamment des consultants, la saisie des absences, de la production mensuelle et des frais se fera par un portail collaboratif interfacé avec Changepoint. Ce sera donc le seul symbole visible de cette réforme pour la grande majorité d'entre nous. A priori selon les décomptes présentés, environ 120 salariés réalisent encore leur rapport d'activité au moyen du fichier Excel.  Il n'est pas prévu à terme de maintenir cette possibilité : les intéressés seront prévenus le moment venu de s'orienter vers l'utilisation du portail collaboratif. Celui-ci permettra d'attacher ses justificatifs de frais scannés, cette pratique est à présent admise par l'administration fiscale sous réserve que le salarié conserve ses originaux pendant trois ans. Ceci n'est pas un changement anodin, la responsabilité de la preuve est donc ici déportée de l'Entreprise vers le salarié. En échange de cette souplesse digitale, la CFDT invite les salariés à la vigilance sur ce point : un contrôle URSSAF de l'entreprise  pourrait ainsi provoquer un contrôle fiscal du salarié et la possibilité d'un redressement s'il ne peut produire ses justificatifs...

  • L'avenir des outils suivants est en suspens, la résorption de leurs fonctionnalités étant à l'étude :

- Sphere (gestion des besoins, du recrutement et du personnel structure)

- Atom (gestion des entrées et sorties du personnel)

  •  S'agissant du BackOffice, le logiciel de comptabilité SAGE est supprimé au profit du logiciel PeopleSoft.

Le logiciel CUBE (gestion du recrutement et du positionnement des consultants, des sous-traitants, des comptes clients, des appels d'offres) devait faire l'objet d'une étude de remplacement ou d'évolution qui est toujours en cours. La décision issue de cette réflexion n'interviendra pas dans le cadre de ce projet mais ultérieurement.

L'hébergement des données Changepoint se fera en France (conformément à la contrainte client Oange notamment) chez OVH (cocorico, nous avons le même !).

Les référentiels de données suivants sont localisés dans les logiciels cités entre parenthèses :  salariés (CEGID),  clients/sous-traitants (Changepoint), fournisseurs (PeopleSoft). Concernant les données et leur unicité, un système sera défini comme maître pour chaque donnée. Ainsi, un candidat sera crée dans CUBE et s'il est recruté les données seront échangées avec ChangePoint puis CEGID (paie).

Concernant le reporting de données à remonter chez RANDSTAD, le logiciel Tagetik sera en lien avec PeopleSoft.

Le déploiement de Changepoint fera l'objet de trois phases correspondant chacune à une montée de version :

  •  V0 (fonctionnalités minimales, échéance cible : 1er janvier 2019)
    • processus cycle de paie
    • processus portail collaborateur
    • traitement des temps, des frais et de la paie
    • processus de facturation et d'encaissement
    • données financières
  •  V1 (échéance cible : 1er avril 2019)
    • processus automatisé du cycle de paie (alertes)
    • processus achats et reportings
  • V2 (échéance cible : 1er octobre 2019)
    • génération automatique de documents
    • échanges automatisé entre services
    • mise en place de nombreux reportings avec un outil BI (Business intelligence) à définir, RANDSTAD utilisant Microstrategy,
    • mise en place d'alertes automatiques (échéances RH, dérive projet)

En résumé, l'ERP Changepoint intégrera les fonctionnalités suivantes :

  • gestion financière des projets
  • gestion du chiffre d'affaires
  • gestion de la facturation
  • gestion des temps
  • gestion des frais
  • gestion des absences
  • gestion des ressources internes et externes

En outre, l'outil permet un certain nombre de fonctionnalités transverses : collecte, diffusion et synthèse facilitées des informations, centralisation du stockage des données, ajout de champs configurables, historisation des données, gestion des approbations et délégations par un workflow.

La possibilité de signature électronique des document est envisagée mais ne fera pas partie de la première version.

Avant la phase de déploiement, les tests en cours sont basés sur des cas réels : le périmètre d'activité d'une agence est par exemple repris sur un mois. Cette phase a d'abord lieu pour les projets en assistance technique avant d'aborder les projets en engagements de résultats.

 

La première lame change les outils, la deuxième lame transfère les salariés afin que rien ne repousse...

 

S'agissant d'une refonte du réseau d'outils complexe formant le vieillissant système d'informations d'AUSY et donc d'un projet d'envergure, la qualité du document de consultation laisse à désirer sur plusieurs points. Sur le plan des impacts techniques, il aurait été bienvenu de disposer d'une table de correspondance des fonctionnalités actuelles et futures ainsi que du devenir des nombreuses demandes d'évolutions formulées sur certains outils tel SIER. Les cartographies présentés ne permettent pas de visualiser simplement le circuit de vie d'une donnée (workflow pour parler chic) ainsi que la localisation des bases de données. Point positif à signaler :  la Directrice de programme Changepoint a opportunément proposé de programmer une démonstration de l'outil. Las, cette présentation ne nous apporte toujours aucune réponses sur le contenu détaillé des processus et notamment des règles de gestion prévues pour la saisie des temps selon la modalité SYNTEC ou encore de la politique des frais professionnels. La mise en attente du remplacement de CUBE est une petite surprise mais qui masque la réalité d'un projet bien plus important qu'un simple changement de logiciel, nous en reparlerons mais il est clair que l'expérience de RANDSTAD dans l'intelligence digitale et le big data seront mises à profit dans ce futur gros chantier...  Le "rien ne change" fait place à l'empilement des projets de réforme, refonte, et revisite diverses et variées. Mr BEHAREL se comporte en Président, en référence à Mr MACRON, et vos représentants du personnel doivent suivre le rythme accéléré du changement. Nous tâcherons de rester dans la course pour vous maintenir informé, tout encouragement est le bienvenu !

Parlons des impacts humains : il est aussi important de pouvoir mettre en perspective les processus actuels et futurs et du même coup de constater la transformation d'une tâche manuelle (ou une séquence de tâches) en une tâche automatisée. A ce sujet, aucune analyse n'a été faite sur les gains de productivité pouvant résulter du déploiement de ce projet. La conséquence de ce big-bang du système d'informations sur les conditions de travail, l'emploi et les qualifications du personnel support est aussi minimisé et ne fait l'objet d'aucune analyse sérieuse. Cela ne serait pas aussi critique si un autre événement précède curieusement le déploiement du projet : le transfert d'une grande partie des services support d'AUSY SAS vers GRF (Groupe RANDSTAD France) (voir notre article). Comment ne pas voir que les salariés les plus concernés dans leur quotidien par ces changements vont (s'ils le souhaitent) changer d'Entreprise et ainsi échapper à la possibilité que nous puissions les accompagner et les représenter dans cette période ? Ce n'est plus un hasard tellement c'est énorme...  Le pari est osé pour nos dirigeants tant la proportion de salariés sujets au transfert ayant comme premier frein la mobilité géographique (Saint-Denis n'est pas limitrophe de Sèvres, loin s'en faut...) n'est pas négligeable... Nombre de départs anticipés sont à prévoir, comment alors gérer sereinement le déploiement d'un tel projet de digitalisation avec un effectif décimé ? Nous reparlerons très vite du sujet puisque des réunions s'enchaînent du 10 au 13 septembre prochain sur ce sujet des transferts vers GRF du 10 au 13 septembre prochain.

Pour connaître depuis longtemps la jungle "ausyienne" des outils désuets et des pratiques exotiques, nous apportons notre soutien à ce projet de digitalisation s'agissant de ses objectifs et des conséquences positives qu'il aura sur le quotidien de tous. Nous ne serons pas aussi alarmistes que d'autres sur les potentielles difficultés de mises en place et le risque de ne pas tenir l'échéance du 1er janvier 2019. Crier aux loups ne sert pas à grand chose :  ce projet sera soit déployé à temps avec un périmètre réduit, soit décalé à une autre échéance. Il est plus important pour la CFDT de veiller à la charge de travail des équipes en cette fin d'année où le projet atteindra son pic d'activité. Il est très probable que des dépassements horaires soient à constater, nous avons donc accueilli positivement les recommandations pertinentes de l'expert qui accompagne le CE et le CHSCT dans cette consultation et approuver les résolutions soumises au vote des élus en fin de séance. Concernant ce projet Changepoint, la négociation de mesures d'accompagnement du personnel en charge du projet est ainsi demandée (mesure de charge de travail, compensation pour dépassement d'horaires et possibilité de prise de congés) et une expertise est confiée aux soins du CHSCT dans le cadre d'un projet important affectant les conditions de travail. Ce travail d'expertise permettra d'éclairer les élus CHSCT et CE afin qu'il puisse émettre un avis au plus tard fin novembre 2018. A suivre donc...