Syndicats et Direction se sont réunis le 5 décembre pour une 12ème (!) réunion de négociation sur le périmètre des instances du personnel dans le cadre des élections professionnelles devant intervenir avant le 7 avril 2019, date d'échéance des mandats actuels. Initié en mai 2018, cette phase s'éternise en raison d'une position excessivement dogmatique (1 ou 2 CSE maximum) et prudente (près de 20% d'élus en moins, plus de 12% d'heures en moins par élus selon la dernière proposition par rapport à la situation actuelle) de notre Direction. La CFDT constate que l'échéance approche et qu'aucun choix clair n'est encore acté dans la négociation sur le nombre d'instances. En conséquence possible de ce jeu de dupes chronophage , il y a fort à parier qu'une carence temporaire des instances se profile à l'horizon.
La base de discussions est fondée sur un CSE unique associé à un schéma de proximité via les représentants du même nom depuis le 3 octobre, soit deux mois. Un projet d'accord a été formulé dans ce cadre sans toutefois donner satisfaction aux syndicats sur les moyens envisagés (volume d'heures de délégation). Au vu de la mauvaise volonté évidente de la Direction d'offrir un cadre adéquat à un dialogue social de qualité, la CFDT a émis des doutes sur un revirement vers deux CSE souhaité par deux syndicats : comment atteindre avec deux CSE ce que la Direction ne souhaite pas lâcher avec un CSE ? La CFDT n'émet pas de réserves pour autant à étudier cette alternative mais entend laisser la main à ses partenaires pour qu'il définisse enfin clairement leurs positions et leur choix. Ce qui a été depuis longtemps clair de notre côté demeure particulièrement obscur ou changeant pour nos camarades CGC et CFTC. Les versions varient suivant l'interlocuteur et aucune voix ne se dégage pour exprimer une posture identifiable pour la Direction. Les pertes de temps sont infinies dans ces réunions où les répétitions et les circonvolutions sont élevées au rang d'art.
C'est donc nanti d'une grande lassitude que nous abordons ce nouveau jour, décidé cette fois-ci à écouter plutôt que d'avancer sans soutien... La Direction entame la réunion en demandant les propositions des syndicats sur la base de deux CSE, conformément aux conclusions de la dernière session. A la question de savoir si la Direction compte partir de sa précédente proposition à 1 CSE en l'extrapolant à deux CSE, celle-ci répond par la négative pour donner le ton sur son entrain à être plus généreuse dans cette configuration. Voilà qui augure bien de la suite...
Dans le cas d'une configuration à 2 CSE (plus un CSE central), la CFTC se positionne pour un découpage Nord - Sud plutôt que Paris - Province. Le CSE Nord regrouperait les établissements de Sèvres, Lille, Strasbourg, Orléans, Nantes et Rennes. Celui-ci engloberait dans son périmètre les deux tiers des salariés de l'Entreprise (ou d'une UES avec AER et AUSY Technology). Cette configuration est effectivement rationnelle sur un plan géographique et favorise pour le Nord des déplacements économes en bilan carbone (lignes de train à grande vitesse sur l'ensemble des destinations sauf Orléans). A l'inverse, le CSE Sud envisagé est vaste et ne dispose pas des mêmes facilités d'accès entre les différentes villes. Il n'y a de toutes les manières guère de compromis idéal sur une partition du territoire national. Sur le plan des dotations de chaque CSE, la différence de rémunération Paris - Province promet un CSE Nord plus richement pourvu en subvention et avantage donc les établissements regroupés avec Sèvres.
Dans le cadre d'une négociation bloquée à 2 CSE maximum du fait de l'absence de volonté de la direction d'aller plus loin, la CGT donne sa préférence à une instance unique mais disposant de moyens plus importants et permettant une vision nationale ainsi qu'une mobilité sans obstacle pour les élus. Les arguments se tiennent de part et d'autre, il faut encore une fois déplorer cette réforme des instances qui ne garantit d'autre forme de proximité que les représentants du même nom et dont seule la négociation permet la mise en place. La CFDT ne souhaite pas prendre position dans ce débat pour le moment et attend les propositions concrètes des deux syndicats CFTC et CFE-CGC pour se prononcer. La CFE-CGC donne sa préférence à une partition Nord-Sud mais insiste sur l'importance d'obtenir plus d'élus CSE que la loi le prévoit sur ce schéma : au lieu de 40 élus titulaires (23 dans le Nord et 17 dans le Sud), le syndicat demande 60 élus sur l'ensemble des deux CSE. Concernant les RP (représentants de proximité), la CFTC demande 46 sièges sans aucune contrainte qu'une partie des RP soit élus CSE. La CFE-CGC souhaite demeurer sur l'hypothèse d'un effectif inspiré du nombre de sièges délégués du personnel et demande 64 RP.
L'hypothèse de deux CSE pose aussi la question de l'articulation des informations et des consultations dans les différentes instances. La Direction évoque son souhait de traiter au maximum les problématiques au niveau du CSE central afin d'éviter la démultiplication des réunions sur un même sujet. Ces aspects relèvent de la négociation et au vu du retard accumulé par un dialogue délicat, la CFDT demeure perplexe sur la capacité des parties à trouver rapidement un accord sur ce point... Le débat se poursuit sur le manque de pouvoir de la Direction des Affaires Sociales face aux opérationnels que sont les chefs d'établissements ou les DOP. La CFDT ajoute que même la Direction d'AUSY n'est plus décisionnaire, notre actionnaire RANDSTAD intervient dans beaucoup de sujets dont sans aucun doute celui-ci. Les négociations sur le même thème du CSE sont d'ailleurs toutes aussi délicates chez notre propriétaire...
La CFDT s'est rapprochée de la CFTC pour échanger sur une méthode d'approche du problème, puisqu'il faut bien l'appeler ainsi, de la structuration des instances CSE. Il s'avère que nos opinions convergent sur les objectifs à atteindre : privilégier les moyens plutôt que la quantité d'élus, apporter de la souplesse, maintenir une proximité de terrain. Il est important de prendre conscience qu'identifier des candidats à des fonctions alourdies tel que le CSE ne sera pas chose aisée. De plus, le respect de la parité proportionnellement aux effectifs dans les listes est aussi une contrainte qui, même si elle est louable, ajoute une difficulté supplémentaire. Pourquoi alors dans ces conditions ne pas se délester de ces charges en laissant une place importante au mandat désignatif (RP) beaucoup plus souple que le mandat électif ? Cet apport peut permettre de répondre aux besoins d'adaptation organisationnelle des instances en fonction de croissance d'effectifs sur les années à venir ou encore de s'accommoder d'évènements non prévisibles (démissions, maladie,...).
La proposition de la CFTC est de permettre de compléter l'instance CSE s'il y manque des élus titulaires et qu'il y a une carence de suppléants, par des RP "conseillers du CSE" dont la voix ne sera alors que consultative. Cette faculté sera accessible dès l'issue des élections en cas de carence de candidats mais aussi tout au long du mandat. Même si on peut en accepter le principe, nous doutons de cette éventualité. Partant de la base actuelle des élus, il y aura très certainement assez de prétendants au sièges des CSE. L'idée à prendre, plus intéressante, est de graduer la responsabilité d'un représentant de proximité en introduisant les statuts suivants :
- RP conseiller du CSE : complète le CSE et peut aider à faire de l’animation socio-culturelle en local dans sa région,
- RP conseiller de commission SSCT : complète la CSSCT, est habilité à réaliser des mission relatives aux sujet SSCT en local dans sa région,
- RP local : équivalent au DP actuel complété de remontées locales sur les sujets hygiène, sécurité avec escalade CSSCT si nécessaire.
Cette échelle de rôles et de responsabilités a l'avantage de proposer aux salariés des mandats modulables selon les aspirations et la charge souhaitée sous le même intitulé légal et la même garantie de statut protecteur. Donc pourquoi pas, sachant que le RP est dans l'esprit déjà un soutien aux instances. Reste donc à envisager des moyens en heures différents selon les fonctions, faute de quoi l'intérêt serait limité...
Justement, parlons du chapitre des heures de délégation. La CFTC propose de postuler dans un accord que les heures d'inter-contrat d'un élu pourront lui permettre d'exercer les tâches liées à son mandat sans qu'il ait à puiser dans son quota d'heures de délégation. Un propos ambitieux qui reste à borner puisque les élus aux mandats lourds qui n'ont plus d'activité professionnelle peuvent alors ne jamais utiliser leur quota d'heures... La formulation reste donc à trouver mais ce n'est jamais que ce que la CFDT proposait il y a quelques mois en début de négociation.
La CFTC propose de collecter tous les mois les heures de délégation non utilisées dans un pool à l'exception des heures des élus du bureau (secrétaire, trésorier) qui seront redistribuées au sein du bureau. Selon l'activité d'un élu (actif à 100%, 50%, 0%, malade, carence de poste), les heures non prises sont reversées dans un pool pour chaque liste syndicale. Ces heures portent un intitulé autre pour ne pas les confondre avec les heures de délégation et s'affranchir ainsi de la limite mensuelle de prise de 150% du quota d'heures. La faisabilité légale nous laisse perplexe sur ce point, des heures qui changent de nom... pourquoi pas mais cela interpelle. La CFTC propose que ce pool soit alimenté aussi de façon ponctuelle par la Direction des Affaires Sociales sur certains sujets pouvant intervenir de façon exceptionnelle (comme par exemple dans le passé : l'OPA de Randstad sur AUSY). Le transfert d'heures sur la base du volontariat serait aussi possible entre listes syndicales, ou entre instances CSE distinctes. Le cumul de ces heures dans le pool est aussi proposé sans limite de durée.
La CFTC décrit ensuite son approche pour déterminer les inconnues du dimensionnement de ce système, à savoir le nombre d'élus et d'heures de délégation. Pour autant ce dimensionnement doit savoir gérer l'évolutivité inhérente à l'Entreprise à savoir : la croissance interne, externe, l'évolution opérationnelle, la fermeture de sites, l'ouverture de sites. La logique est d'élaborer des ratios (valeur cible) : X élus CSE pour Y salariés, X élus CSSCT pour Y salariés, X représentants de proximité pour Y salariés, X heures de délégation par élu pour Y salariés. Des seuils haut de déclenchement (valeur limite) de désignations (RP, membres CSSCT) ou d'élections complémentaires (CSE) doivent être identifiés. La mesure des ratios serait évaluée tous les mois. Les cas de carence définitive (départ de l'Entreprise , démission du mandat) ou temporaire (maladie, congé sabbatique) d'un siège font l'objet d'un processus de désignation complémentaire. Afin de d'aménager d'éventuelles dispositions finalement mal ajustées, il est proposé de créer par accord une commission de révision annuelle sur ces aspects.
A l'issue de cet exposé, la Direction trouve que certaines idées sont intéressantes et méritent réflexion, sans plus de détails. Elle annonce retravailler sa proposition d'origine sur deux CSE sur la base des éléments présentés ce jour.
Un débat final s'organise sur les temps de trajets impliqués par des instances CSE aussi vastes dans la cadre d'élus se déplaçant à la rencontre de salariés ou d'autres élus. Qui plus est, les temps de déplacement seront à décompter des heures de délégation. La prise en compte des frais de déplacement n'est pas assurée puisque les usages en ce domaine sont remis en cause et dénoncés par la Direction. La négociation qui s'ensuivra sur l'exercice des mandats est donc pour beaucoup d'élus un élément qui pèsera sur la fixation des futures instances représentatives. Nous en parlions déjà, cette remise en cause des usages des IRP par la Direction sonne comme une sanction et une intimidation de plus afin d'inciter le syndicats a accepter les termes d'une négociation sur le périmètre probablement en échange de concessions sur les pratiques observées dans le cadre de l'exercice des mandats.
La prochaine réunion est programmée ... au 9 janvier, ce qui nous garantit encore un mois de perdu ! Nous demandons à la Direction un retour précoce sur ses propositions afin de ne pas les découvrir la veille au soir de la prochaine réunion. Le temps presse et absolument rien n'est encore statué : nombre de CSE, nombre d'élus de toutes sortes, nombres d'heures de délégation ou d'un autre nom. La démonstration du jour fut très théorique, seuls le nombre d'élus CSE (40 titulaires, 40 suppléants) et de RP (46) ont été concrètement avancés. La Direction n'a rien proposé ou contredit sur ce point (faute aussi de n'avoir pas eu le recul suffisant), il est donc frustrant de sortir de cette énième réunion sans plus de certitudes. Cette négociation est mal engagée depuis son début par le manque caractérisé d'écoute de la part de notre Direction. Si accord il y a, il est probable qu'il serve de support à une campagne électorale de dénigrement à ceux qui ne le signeront pas envers ceux qui l'auront signé. L'exercice est périlleux et s'annonce encore semé d'embûches avec la contrainte de traiter tous les sujets relatifs aux futures instances en l'espace d'un temps record...